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A L'Ombre des Jeunes Filles en Fleur, Vol. 2

By Proust, Marcel

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Book Id: WPLBN0000619855
Format Type: PDF eBook
File Size: 0.9 MB
Reproduction Date:

Title: A L'Ombre des Jeunes Filles en Fleur, Vol. 2  
Author: Proust, Marcel
Volume:
Language: English
Subject: Literature & thought, Literature and history, Literature & philosophy
Collections: Project Gutenberg Consortia Center
Historic
Publication Date:
Publisher: Project Gutenberg Consortia Center

Citation

APA MLA Chicago

Proust, M. (n.d.). A L'Ombre des Jeunes Filles en Fleur, Vol. 2. Retrieved from http://gutenberg.cc/


Excerpt
Cependant Mme Bontemps qui avait dit cent fois qu?elle ne voulait pas aller chez les Verdurin, ravie d?etre invitee aux mercredis, etait en train de calculer comment elle pourrait s?y rendre le plus de fois possible. Elle ignorait que Mme Verdurin souhaitait qu?on n?en manquat aucun; d?autre part, elle etait de ces personnes peu recherchees, qui quand elles sont conviees a des series par une maitresse de maison, ne vont pas chez elle comme ceux qui savent faire toujours plaisir, quand ils ont un moment et le desir de sortir; elles, au contraire, se privent par exemple de la premiere soiree et de la troisieme, s?imaginant que leur absence sera remarquee et se reservent pour la deuxieme et la quatrieme; a moins que leurs informations ne leur ayant appris que la troisieme sera particulierement brillante, elles ne suivent un ordre inverse, alleguant que malheureusement la derniere fois elles n?etaient pas libres. Telle Mme Bontemps supputait combien il pouvait y avoir encore de mercredis avant Paques et de quelle facon elle arriverait a en avoir un de plus, sans pourtant paraitre s?imposer. Elle comptait sur Mme Cottard, avec laquelle elle allait revenir, pour lui donner quelques indications. Oh! Madame Bontemps, je vois que vous vous levez, c?est tres mal de donner ainsi le signal de la fuite. Vous me devez une compensation pour n?etre pas venue jeudi dernier... Allons rasseyez-vous un moment. Vous ne ferez tout de meme plus d?autre visite avant le diner. Vraiment vous ne vous laissez pas tenter, ajoutait Mme Swann et tout en tendant une assiette de gateaux: Vous savez que ce n?est pas mauvais du tout ces petites saletes-la. Ca ne paye pas de mine mais goutez-en, vous m?en direz des nouvelles. Au contraire, ca a l?air delicieux, repondait Mme Cottard, chez vous, Odette, on n?est jamais a court de victuailles. Je n?ai pas besoin de vous demander la marque de fabrique, je sais que vous faites tout venir de chez Rebattet. Je dois dire que je suis plus eclectique. Pour les petits fours, pour toutes les friandises, je m?adresse souvent a Bourbonneux. Mais je reconnais qu?ils ne savent pas ce que c?est qu?une glace. Rebattet, pour tout ce qui est glace, bavaroise ou sorbet, c?est le grand art. Comme dirait mon mari, le nec plus ultra. Mais ceci est tout simplement fait ici. Vraiment non? Je ne pourrai pas diner, repondait Mme Bontemps, mais je me rassieds un instant, vous savez, moi j?adore causer avec une femme intelligente comme vous. Vous allez me trouver indiscrete, Odette, mais j?aimerais savoir comment vous jugez le chapeau qu?avait Mme Trombert. Je sais bien que la mode est aux grands chapeaux. Tout de meme n?y a-t-il pas un peu d?exageration? Et a cote de celui avec lequel elle est venue l?autre jour chez moi, celui qu?elle portait tantot etait microscopique. Mais non je ne suis pas intelligente, disait Odette, pensant que cela faisait bien. Je suis au fond une gobeuse, qui croit tout ce qu?on lui dit, qui se fait du chagrin pour un rien. Et elle insinuait qu?elle avait, au commencement, beaucoup souffert d?avoir epouse un homme comme Swann qui avait une vie de son cote et qui la trompait. Cependant le Prince d?Agrigente ayant entendu les mots: Je ne suis pas intelligente, trouvait de son devoir de protester, mais il n?avait pas d?esprit de repartie. Taratata, s?ecriait Mme Bontemps, vous pas intelligente! En effet je me disais: Qu?est-ce que j?entends? disait le Prince en saisissant cette perche. Il faut que mes oreilles m?aient trompe. Mais non, je vous assure, disait Odette, je suis au fond une petite bourgeoise tres choquable, pleine 5 de prejuges, vivant dans son trou, surtout tres ignorante. Et pour demander des nouvelles du baron de Charlus: Avez-vous vu cher baronet? lui disait-elle. Vous, ignorante, s?ecriait Mme Bontemps! He bien alors qu?est-ce que vous diriez du monde officiel, toutes ces femmes d?Excellences, qui ne savent parler que de chiffons!... Tenez, madame, pas plus tard qu?il y a huit jours je mets sur Lohengrin la ministresse de l?Instruction publique. Elle me repond: Lohengrin? Ah! oui, la derniere revue des Folies-Bergeres, il parait que c?est tordant. He bien! madame, qu?est-ce que vous voulez, quand on entend des choses comme ca, ca vous fait bouillir. J?avais envie de la gifler. Parce que j?ai mon petit caractere vous savez. Voyons, monsieur, disait-elle en se tournant vers moi, est-ce que je n?ai pas raison? Ecoutez, disait Mme Cottard, on est excusable de repondre un peu de travers quand on est interrogee ainsi de but en blanc, sans etre prevenue. J?en sais quelque chose car Mme Verdurin a l?habitude de nous mettre aussi le couteau sur la gorge. A propos de Mme Verdurin demandait Mme Bontemps a Mme Cottard, savez-vous qui il y aura mercredi chez elle?... Ah! je me rappelle maintenant que nous avons accepte une invitation pour mercredi prochain. Vous ne voulez pas diner de mercredi en huit avec nous. Nous irions ensemble chez Madame Verdurin. Cela m?intimide d?entrer seule, je ne sais pas pourquoi cette grande femme m?a toujours fait peur. Je vais vous le dire, repondait Mme Cottard, ce qui vous effraye chez Mme Verdurin, c?est son organe. Que voulez-vous, tout le monde n?a pas un aussi joli organe que Madame Swann. Mais le temps de prendre langue comme dit la Patronne et la glace sera bientot rompue. Car dans le fond elle est tres accueillante. Mais je comprends tres bien votre sensation, ce 6 n?est jamais agreable de se trouver la premiere fois en pays perdu. Vous pourriez aussi diner avec nous, disait Mme Bontemps a Mme Swann. Apres diner on irait tous ensemble en Verdurin, faire Verdurin; et meme si ce devait avoir pour effet que la Patronne me fasse les gros yeux et ne m?invite plus, une fois chez elle nous resterons toutes les trois a causer entre nous, je sens que c?est ce qui m?amusera le plus. Mais cette affirmation ne devait pas etre tres veridique car Mme Bontemps demandait: Qui pensez-vous qu?il y aura de mercredi en huit? Qu?est-ce qui se passera? Il n?y aura pas trop de monde, au moins? Moi, je n?irai certainement pas, disait Odette. Nous ne ferons qu?une petite apparition au mercredi final. Si cela vous est egal d?attendre jusque-la... Mais Mme Bontemps ne semblait pas seduite par cette proposition d?ajournement.

 
 



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